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Euro-Toques continue le combat pour la qualité du produit et la biodiversité

Deauville (14) Le lobby pour la défense du produit, fondé il y a 31 ans par Paul Bocuse, poursuit sa lutte en adoptant lors de son congrès à Deauville une « motion à voter contre l’invasion de l’agrochimie dans nos assiettes » qu’il va soutenir jusqu’à Bruxelles.

Gastronomie. Réunis à Deauville ce lundi pour leur congrès annuel, les Euro-toques France veulent sauvegarder la qualité des produits qu’ils cuisinent.
Maître cuisinier de France, membre fondateur du Club de la table française et président honoraire de l’association Euro-Toques France, fondée avec son ami Paul Bocuse il y a trente ans, Bernard Fournier présidait ce congrès annuel.

Que représente Euro-Toques aujourd’hui ?

« C’est un regroupement de 3 000 chefs dans 14 pays dont l’objectif principal est de défendre le goût vrai, l’authenticité et la qualité des produits. »

Quel était votre ordre du jour ?

« Cette année, nous sommes inquiets d’un regroupement, celui de Bayer et Monsanto. Ce sont deux semenciers importants qui veulent avoir la mainmise sur les semences pour que le paysan ne soit plus en mesure de faire ses propres semences, ses propres variétés. Il y a le risque que la biodiversité n’existera plus et que l’authenticité et le moyen économique seront remis en cause par ces semenciers qui sont aussi des gros producteurs d’herbicides et de pesticides. Nous nous battons tant pour la santé que pour le goût et c’est ce que nous ferons remonter à nos adhérents et à la commission alimentaire auprès de la Commission européenne où nous sommes présents depuis 25 ans. »

C’est quoi une alimentation saine aujourd’hui ?

« C’est déjà prendre des produits de saison qui sont dans leur plénitude au niveau du goût, mais aussi les moins chers. Il faut se fixer d’acheter le moins loin possible, dans un environnement de 50 à 100 kilomètres pour avoir des produits frais de qualité et protéger la planète. C’est aussi transformer sur place le produit et ne pas avoir une alimentation – ce qui se fait de plus en plus aujourd’hui – qui vient des groupements de l’agroalimentaire avec des rehausseurs de goûts, des adjuvants, des édulcorants qui sont en grande partie chimiques… »

C’est pour cela que vous avez invité un nutritionniste et le professeur David Khawat chef du service d’oncologie à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière ?

« Oui. Ce grand cancérologue est venu nous expliquer la recrudescence des cancers qui sont de plus en plus dus à l’alimentation, à la mauvaise alimentation. Il faut aussi développer dans les écoles une véritable alimentation saine qui évitera de développer cette obésité infantile qui est passée de 8 % il y a 15 ans à 16 % en Europe aujourd’hui. Trop de sucre, trop de sel, trop de snacking ! Manger c’est être assis et mâcher, c’est manger bon, c’est manger plaisir. Nous avons ainsi été des pionniers pour avoir imposé à Bruxelles des appellations d’origine protégées et que l’on n’ait pas d’un pays à l’autre d’appellations différentes pour un faux produit… Nous avons aussi gagné une bataille du fromage au lait cru et cela intéresse la Normandie ! Et j’ai eu plus d’aide à la Commission européenne avec l’Espagne, l’Italie, voire la Hollande qu’avec la France… Parce qu’il y a des groupes alimentaires ici que cela n’intéresse pas que l’on fasse un fromage en choisissant la race de bovins et comment elle est alimentée ! Avec un lait naturel qui ne soit pas pasteurisé pour garder un goût authentique. Nous avons un patrimoine culinaire français et européen nous ne voulons pas nous le faire manger ! »

Un plat sain et de saison à préparer, vous feriez quoi aujourd’hui chef ?

« Ici, en Normandie, il y a un poisson bleu qui est très riche en oméga 3 et bon pour la santé : le maquereau. On enlève les arêtes, sa petite peau bleue qui peut être parfois difficile à digérer et on le snacke d’un côté. On le sert sur des pommes tièdes et des petits oignons rouges, voilà un plat tout simple ! »